La mascotte cinq étoiles veut rencontrer le Président de la République

Ngando Pickett. Cet inconditionnel des stades de football vit sa 20ème Coupe d’Afrique des Nations dans son pays, espérant une sixième victoire finale et enfin une reconnaissance nationale par des médailles.

S’il y a un seul camerounais qui croit en la victoire finale des Lions Indomptables dans cette CAN 2021 malgré les prestations en demi-teintes de notre équipe nationale, c’est Ngando Pickett. Il ne porte pas de maillot, mais il est habillé en Vert-Rouge et Jaune depuis des années, dans les gradins des stades de football et d’autres arènes sportives quand son pays défend ses couleurs. Ce Camerounais esquisse des pas de danses qui mettent ses 195 centimètres et ses 160 kilogrammes à l’épreuve pendant les matches et compétitions à répétitions depuis plus de 40 ans, avec un style original de supporter des Lions Indomptables qui a inspiré le monde entier. Aujourd’hui, dans tous les stades du monde, toutes les équipes nationales veulent présenter un supporter peint aux couleurs de leurs drapeaux, mais celui du Cameroun est original. Porté depuis des décennies par un homme qui a troqué son nom de famille pour un surnom que tout le monde connait, et lui-même s’en est habitué et s’identifie comme tel : « Je m’appelle Mouyebe Henri, alias Ngando Pickett, la mascotte des Lions Indomptables du Cameroun ». Pourquoi et comment avoir choisi ce nom connu et reconnu mondialement aujourd’hui, la mascotte a plutôt suivi le choix du peuple depuis très petit : « Je n’ai pas choisi ce nom. J’ai une tante qui n’a pas eu de chance d’avoir un enfant. C’est elle qui m’a élevé. Quand je suis né, elle a d’abord proposé à mon père, son cousin, de me donner le nom de son père à elle. C’est comme ça qu’ils s’accordent pour que je m’appelle Ngando (le Caïman en langue Douala, ndlr). Et comme j’aimais la danse dans mon enfance, mes amis m’ont donné le surnom de Wilson Pickett. Cela faisait trop américain, et on a coupé Wilson pour remplacer par Ngando. Et depuis très petit donc, on m’appelle Ngando Pickett. Je porte donc ce nom de Ngando Pickett depuis l’âge de huit ans ».

A 66 ans, il n’a pas arrêté de danser, il est le joueur qui n’a jamais été absent à son poste dans les gradins, lorsque les Lions Indomptables jouent sur la pelouse. Alors qu’il est déconseillé de manger à une certaine heure proche du match, ce joueur particulier connait plutôt une science inverse qui lui impose de manger deux poulets entiers à quelques heures de son déploiement. Un avant de donner son corps à la peinture : « j’ai une équipe d’artistes qui s’occupent de me peindre aux couleurs nationales avant chaque match, et qui doit me démaquiller après le match. Ce sont des séances de travail qui nécessitent beaucoup de temps, d’argent et d’énergie. Je mange avant, après ces séances et je dois beaucoup manger après les prestations pendant les matches aussi ». Comme ses talents de danseurs sont innés, ce Camerounais n’a pas fait d’efforts pour arriver au football : « Je ne suis pas arrivé au foot, c’est le foot qui est arrivé à moi, puisque mon papa était un ancien dirigeant du Caïman Club de Douala. Le siège du club c’était la maison familiale où je rencontrais joueurs et dirigeants qui venaient voir mon père. J’ai grandi avec tout ce monde-là ». Celui qui avait été un des ramasseurs de balles au stade de la Réunification en 1972 lors de la première Can organisée au Cameroun, devient footballeur et tente une aventure qui s’achève par un atterrissage forcé en Côte d’Ivoire où il commence sa carrière de supporter inconditionnel des Lions Indomptables : « Moi-même j’ai joué au football dans le Dragon de Douala, puis je suis allé en Côte d’Ivoire où j’ai joué à EMCP de Yamoussoukrou, puis un bref passage en Europe et je suis revenu en Afrique dans les années 80 et je me suis résolu à supporter les Lions Indomptables du Cameroun. Il y avait une compétition en Côte d’Ivoire avec plusieurs disciplines comme l’athlétisme, le football, le basketball et le handball. Le Cameroun avait donc plusieurs équipes et n’avait pas de supporters. J’ai regroupé quelques quatre compatriotes, et nous avons accompagné ces équipes-là. Depuis cette année 1981, je ne suis plus déconnecté de notre équipe nationale de football. C’est d’ailleurs depuis la Côte d’Ivoire, comme supporter des Lions que je participe à la première victoire des Lions en CAN ». Depuis ce premier trophée au pays d’Houphouët Boigny, Ngando Pickett a été des expéditions du Maroc en 1988, du Nigéria en 2000, du Mali en 2002 et celle du Gabon en 2017 avec le fameux titre de l’artiste Reniss : « Dans la sauce » qui a été repris par tous les joueurs, des Lions, journalistes, et supporters camerounais. Une reprise inspirée par Ngando Pickett, introduite dans un discours présidentiel : « Vous avez mis toutes ces équipes dans la sauce », avait lancé Paul Biya au moment où il recevait les Lions Victorieux de 2017. Comme lors des quatre autres victoires des Lions, recevant une médaille de la présidence.

Cinq CAN gagnés, mais toujours pas de médaille

Les aventures de la Mascotte Ngando Pickett avec les Lions Indomptables peuvent faire l’objet de plus de trois livres, lui qui a souvent fait des trajets par route comme celui de la CAN 2000, organisée par le Nigéria et le Ghana : « il me souvient que nous avons trouvé Wome Nlend à la rue de la joie à Douala et  nous lui avons dit qu’il va nous trouver au Ghana, malgré le fait que le Ministre Owona nous avait avertis que nous n’auront pas d’accompagnement. Nous avons pris la route et le trajet c’était Douala- Kumba – Mamfé -Ekok -Ekom (déjà au Nigéria, ndlr) – Calabar – Lagos – Lomé (Au Togo) – Accra (au Ghana) où nous sommes arrivés à 3 heures du matin le jour du match d’ouverture et nous avons dormi à la belle étoile devant le Novotel. Quand les Lions sont sortis à 10 heures, j’ai mis le feu et les Lions ont dit : nous allons gagner la coupe, et nous avons gagné ».

Voici un Lion Indomptable qui est vainqueur des cinq titres, la mascotte indiscutable des Lions Indomptables qui n’a pas encore reçu de médaille du Président de la République, mais qui garde espoir. A 66 ans, Ngando Pickett montre déjà des signes de fatigue, et espère une victoire finale des Lions Indomptables sur le sol camerounais, pour une sortie honorable, avec une sixième étoile, et peut-être une réception au Palais Présidentiel pour recevoir autant de médailles de reconnaissance nationale. Ngando Pickett sera alors officiellement une pièce du musée du football camerounais. Seize Coupes d’Afrique des Nations avec les Footballeurs, deux de Volleyball, une du Basket, une du judo et une de l’haltérophilie. Des performances patriotiques qui méritent certainement d’être médaillé par le Président de la République

David Eyenguè Nzima