Ligue 1. Pour aller jouer ses matches dans la partie sud du pays, Coton Sport de Garoua doit faire un parcours de plus de  1000 bornes, au moins une dizaine de fois par an, contre une seule fois l’an,  pour ses adversaires.

En l’absence de l’avion, voici le parcours routier qui est imposé à Coton Sport de Garoua, pour rallier le grand sud du Cameroun par bus ou par voiture : Garoua – Ngaoundéré c’est 278 km, Ngaoundéré – Meiganga, c’est 150 km,  Meiganga -Garoua-Boulai c’est 91 km de plus, Garoua-Boulai – Bertoua c’est 238 km et Bertoua – Yaoundé c’est 336 km. Soit exactement 1093 kilomètres de route pour aller jouer un match. Un périple que l’équipe du Nord doit souvent faire une dizaine de fois en aller et retour chaque saison, contre une seule fois pour tous ses adversaires qui ne viennent à Garoua que pour une rencontre chaque année.

Depuis deux années sportives consécutives, les amoureux du football au Cameroun ont constaté l’absence du nom de Coton Sport de Garoua au palmarès des champions du Cameroun. Pour un club qui depuis 2003, tient le haut du pavé de ce palmarès : 15 titres de champion du Cameroun et six Coupes du Cameroun. Si on ajoute sa finale continentale perdue en 2008, on est en droit de se poser des questions sur cette période morte : « Les nombreux titres gagnés, et même les bonnes performances enregistrées pendant ces années cachent très mal les difficultés que rencontre notre équipe. Garoua n’est pas la porte d’à côté. Et si certains dirigeants de notre football ne connaissent pas les réalités et programment nos matches comme on programme ceux des équipes de l’Ouest Cameroun par exemple, sans tenir compte des distances que nous avons à parcourir, c’est fausser les données dès le départ », nous a lancé un supporter de Coton très énervé. « Si vous regardez par exemple la programmation du championnat écoulé, c’est simplement inhumain ce qu’on nous a imposé. Entre la 7ème et la 10ème journée, Coton Sport doit faire quatre aller et retours dans le Grand Sud, et ceci en l’espace de 12 jours (Union – Coton 2-2 à la 7ème , Coton – Dragon 0-1 à la 8ème, Fovu – Coton 0-2 à la 9ème et Canon – Coton 3-0 à la 10ème journée, NDLR ). Et cela passe inaperçu, alors que Garoua – Yaoundé, c’est 1093 kilomètres. Quand il faut aller jouer à Limbé ou à l’Ouest Cameroun, il faut y ajouter plus de 300 autres kilomètres et ce trajet en aller et retour, c’est simplement un calvaire », nous a renchérit Nouhou Moussa, le directeur sportif du club.

L’absence des avions, et l’obligation de prendre la route font de Coton,  selon les dirigeants du club de la Benoué, un club ordinaire qui est pénalisé par d’autres choses comme l’organisation : « tenez, pour ce qui est de la saison 2018-2019 qui s’est terminée par des play-offs qui n’étaient pas prévus en début de saison, on nous a imposé d’aller séjourner six mois dans un hôtel, loin de notre base. Loin de nos installations, avec des dépenses énormes supplémentaires qui n’avaient pas été prévues en début de saison. Nous avons terminé deuxième, malgré tout », a tenu à ajouter le directeur sportif. Avant, l’équipe faisait ces déplacements dans le grand sud en avion et passait 1 heure et 15 minutes pour atterrir à Douala ou Yaoundé, avant de terminer le reste du parcours par route. « C’était moins pénible et plus rassurant pour nos joueurs. Avec le nouveau système que nous vivons depuis deux années, il faut des robots à la place des joueurs pour répondre à tous les coups. Nos joueurs sont des hommes qui ont besoin de repos, du temps d’entrainement, et de récupération comme les autres clubs. Vous imaginez un club comme Fovu de Baham qui doit jouer contre Feutcheu à Badjoun, ou encore si Panthère de Bangangté  doit jouer Stade Renard à Melong, chaque club  part de sa base le jour du match et sera de retour le soir après le match en attendant la prochaine rencontre. Pendant ce temps, Coton Sport de Garoua est en route pour les voyages, avec notre réseau routier que nous connaissons tous », a tenu à ajouter Adamou Saliou, le responsable de la communication de l’équipe. Une situation qui fait de Coton Sport, le seul club du septentrion  en Ligue 1 depuis plusieurs saisons, les autres Scorpion de Bé, Espérance de Guider, ayant goûté au calvaire de la présence en championnat d’élite que pour quelques mois. Le constat est fait, le septentrion n’est pas la porte d’à côté, et l’organisation de nos championnats n’est pas une aide en plus pour ces clubs. Kohi Club de Maroua, Sahel de Maroua, Ziver de Mokolo, Scorpion de Bé, Espérance de Guider, Entente de Ngaoundéré ont subi le même sort des défaites infligées par les déplacements avant de descendre sur les pelouses à domicile ou à l’extérieur, Université de Ngaoundéré du Professeur Nkou Mvondo et Coton Sport de Garoua font de la résistance pour donner à la jeunesse du septentrion, les mêmes chances d’épanouissement par le sport, que leurs compatriotes du Grand Sud.

David Eyenguè à Garoua