Désiré Tchutchoua, promoteur de la boulangerie Maison Désiré, explique pourquoi leur secteur d’activité bat de l’aile, depuis l’augmentation du prix de la farine sur le marché.

Dans votre fonctionnement, vous avez des livreurs qui sont aussi devenus de vrais patrons ?

Les livreurs sont considérés comme les intermédiaires du marché du pain à Douala. Nous souffrons aujourd’hui avec ces intermédiaires qui font beaucoup plus de marges que nous qui avons investi dans la boulangerie. Il faut savoir qu’aujourd’hui, le marché du pain est à Douala à 80 francs, alors que la réglementation nous oblige à mettre le pain à 110 francs. Si on est à 80 francs, c’est par rapport à la pression des livreurs. Ces intermédiaires ne respectent même pas d’abord les paiements qu’ils doivent faire  quand ils prennent le pain, et d’autres parts, ils montent les patrons entre eux, ce qui rend la situation très difficile.

Que faut-il faire selon vous pour changer la donne ?

On est tributaire de la farine. Le prix de la farine ne faisant qu’augmenter, cela pousse les patrons à augmenter le prix du pain par rapport à ses intermédiaires. Là, il n’est pas question d’une augmentation du prix du pain au consommateur, mais d’augmenter le prix à l’intermédiaire. On sait très bien que le prix de la farine qui augmente sur le marché n’est pas dépendant des meuniers, mais du coût de la matière première qui est le blé sur le marché international. Ce qu’il y a lieu de faire, c’est que le patron se concertent et qu’ils soient solidaires pour une augmentation généralisée par rapport à ces intermédiaires-là, pour rapprocher le prix sorti d’usine à 110 francs comme nous l’impose la réglementation.

Et pourquoi cela semble difficile de le faire chez les patrons que vous êtes ?

Parce que le marché de la farine, le marché du pain est divisé en trois catégories : il y a des patrons qui sont les gros porteurs, qui ont une grosse capacité financière, qui ont fait de gros investissements. Vous avez d’autres patrons qui ont un ou deux fours, donc qui essayent de joindre les deux bouts. Vous avez aussi des boulangeries clandestines dans les sous-quartiers. Quand vous avez ces trois types, c’est très difficile de s’entendre sur le prix du pain, parce qu’ils ont des problématiques complètement différentes. Les gros porteurs qui ont investi massivement jouent sur la masse. Ils veulent produire la grande quantité et peut se contenter des marges à 10, 15 ou 20  francs. Dans le même cas, le patron qui a deux fours ne peut pas se contenter de ces marges-là, parce qu’il a des charges plus élevées. Celui du quartier, le sous-marin, n’a pas d’impôts, ni de taxes à payer. Il est libre de fixer un prix. Dans ce contexte, l’entente est quasi impossible. Pour cela, je propose de faire appel à la responsabilité et à l’honneur des patrons. Nous devons rédiger un certain document d’engagement des patrons, sur un prix commun à proposer au marché. L’autre chose, c’est d’inciter les patrons à adhérer au syndicat. Et pour le faire, il faut que le patron y trouve son avantage. Le syndicat doit avoir des liens avec les meuniers et quand j’adhère au syndicat, je peux par exemple bénéficier de certains avantages. Par exemple  avoir le prix de la farine beaucoup moins cher que ce que le membre non syndiqué ne peut  avoir.